Quel bilan pour le CIR ?

Wojciech Lewandowski - webmaster éditorial

Missionnée par l’Assemblée nationale pour répondre à cette question, la Cour des comptes a rendu son rapport public, mercredi 11 septembre 2013. Depuis la réforme de 2008, le Crédit d'Impôt Recherche (CIR) est devenu une aide fiscale majeure pour les dépenses de R&D des entreprises… Mais pour autant, y a-t-il eu une croissance économique ou un développement de l’emploi ? La réforme de 2008 du CIR s’avère-t-elle efficace ? 
Oui, estiment les entreprises qui considèrent ce dispositif comme très positif. Difficile pour autant de dresser un bilan précis de son efficacité, faute de données offrant un recul suffisant. « Améliorer la qualité des chiffrages prévisionnels associés au CIR » est à ce propos une des recommandations du rapport. Pour information, l’évolution du CIR a été examinée sur la base des dernières données disponibles, à savoir l’année 2011. Et au regard des chiffres, la Cour des comptes déplore un manque « d’effet d’entrainement » du nouveau régime du CIR, qui estime que « l’évolution des dépenses de R&D des entreprises n’a pas été en proportion de l’aide fiscale apportée par l’Etat » et propose par exemple de « supprimer le doublement d’assiette pratiqué pour la sous-traitance publique et le forfait de dépenses de fonctionnement de 200% pour l’embauche de docteurs » qui « nuisent à la simplicité du CIR et conduisent à des taux d’aide excessifs ».

Le rapport met en lumière l’évolution des dépenses de R&D des entreprises et celle du CIR :


Face à ce bilan, la Cour des comptes a proposé plusieurs pistes permettant de contenir le coût du CIR tout en conservant l’architecture issue de la réforme de 2008. Les dépenses relatives aux jeunes docteurs sont à ce titre, en ligne de mire (page 157 à 160).

Le rapport rappelle que « Le doublement des dépenses prises en compte au titre des jeunes docteurs a été instauré par la loi de finances initiale pour 2006 : il concerne les dépenses de personnel qui se rapportent à des titulaires d’un doctorat ou d’un diplôme équivalent ; durant les douze premiers mois suivant leur première embauche, ces dépenses sont prises en compte pour le double de leur montant à condition que les contrats de travail soient à durée indéterminée et que l’effectif salarié de l’entreprise ne soit pas inférieur à celui de l’année précédente. »

Selon l’analyse qui a été faite, « les frais de fonctionnement rattachés à ces emplois bénéficiaient déjà d’un régime particulier puisqu’ils étaient fixés forfaitairement depuis la loi sur l’innovation et la recherche de 1999 à 100 % des dépenses de personnel. La loi de finances initiale pour 2006 a porté ce taux à 200 % (contre 75 %, puis 50 % pour les autres frais de personnel). La réforme de 2007 a maintenu ces avantages et en a porté la durée à vingt-quatre mois. La combinaison de ces deux modalités de calcul dérogatoires aboutit à un crédit d’impôt correspondant à 120 % de la dépense de personnel engagée par l’entreprise. Un tel taux de soutien public, supérieur à la dépense engagée, n’apparaît pas justifié. »





Bien que le nombre d’entreprises déclarant des salariés dans ce cadre ait doublé entre 2007 et 2010, la Cour des comptes constate que « la proportion des entreprises qui déclarent des jeunes docteurs est restée presque stable, autour de 5 % ».








Le rapport met l’accent sur le fait que :

« les pouvoirs publics disposent d’autres outils d’intervention pour favoriser le développement de l’emploi des chercheurs, que ce soit en amont de l’obtention de la thèse (conventions CIFRE) ou dans le cadre de jeunes entreprises innovantes. Or ces deux dispositifs ont été réduits dans le cadre de la montée en puissance du CIR. En la matière, il aurait été préférable de ne pas compliquer le crédit d’impôt recherche par un mécanisme dérogatoire et de conserver toute leur portée aux outils spécifiques déjà existants pour favoriser l’insertion professionnelle des docteurs et le développement de jeunes entreprises innovantes. »

Il propose également la suppression de l’assiette des dépenses éligibles des activités qui ne relèvent pas de la recherche mais de son aval :

- La normalisation
- La veille technologique
- La défense et le dépôt des brevets.

En ce qui concerne le crédit d’impôt innovation, la Cour des comptes estime que le chiffrage repose sur des bases fragiles et peut appeler à une réduction du plafond des dépenses éligibles. De même, elle estime que, conformément aux pratiques fiscales usuelles, les entreprises ne devraient pas pouvoir cumuler deux crédits d’impôt, en l’occurrence le CIR et le CICE, sur une même assiette. L’imposition à taux réduit des cessions de brevets et de leurs revenus pourrait également être réexaminée.

Pour conclure, la Cour des comptes énonce 3 points d’optimisation :




> Télécharger le rapport « L’évolution et les conditions de maîtrise du crédit d’impôt en faveur de la recherche » (les 17 recommandations de la Cour des comptes se trouvent aux pages 13 et 14)