Rien de tel pour décrocher un emploi dans l’industrie que de s’adresser directement aux recruteurs du privé et aux coachs professionnels. C’est ce qu’ont pu faire les participants d’une session questions-réponses lors de la conférence ESOF (European Science Open Forum) 2016. Retour sur cette session conseils et bonnes pratiques !
Conseillers : Dr James Brosnan, The Scotch Whisky Research Institute (Royaume-Uni), Jakob Wolter, Novo Nordisk (Danemark), Dr Martin C. Michel, Boehringer Ingelheim Pharma GmbH & Co. KG (Allemagne), Dr Tina Persson, Talent Attraction (Suède), Bérénice Kimpe, ABG, Dr Laurence Theunis, Doctorate.be (Belgique). Chairman: Sarah Blackford, Society for Experimental Biology (Royaume-Uni).
"Réseauter"
Quelle est l'importance du réseau pour trouver un emploi dans l'industrie ? Cette question a soulevé une réponse unanime des recruteurs, laquelle n’a pas manqué d’étonner l’auditoire constituée d’une centaine de personnes : "jusqu'à 90 % des emplois sont pourvus grâce au réseau", se sont-ils accordés à dire. "Ne vous fiez pas aux annonces d’emploi car cela restreindrait fortement votre visibilité sur le marché du travail, et évitez les invitations à 'envoyer un email' que l’on trouve sur les sites Web", a expliqué Tina Persson, qui a déjà trouvé plus de 6 000 CVs dans l'une ces boîtes mail "trou noir". Pour Jakob Wolter, il est préférable d'éviter le PDG et cibler plutôt les cadres intermédiaires pour le premier contact ou les candidatures spontanées. James Brosnan a repris cet argument, en soulignant la nécessité de développer des connexions personnelles via les médias sociaux, ou à l’occasion de réunions en tête-à-tête et d’événements. "Vous devriez passer au moins 50 % de votre temps à parler aux gens lors de conférences", a conseillé ce dernier. "Échangez vos noms et coordonnées, et assurez-vous de faire suivre votre rencontre par un email courtois pour consolider vos nouvelles relations."
Surmonter les obstacles
Quitter le milieu universitaire constitue une décision difficile, avec de nombreux obstacles à la clé, à commencer par la méconnaissance de votre futur environnement de travail, ou encore la relation à vos superviseurs académiques dans l'intervalle, puisque beaucoup ont un a priori négatif sur la reconversion dans le privé. Comment faire pour négocier au mieux ces heurts et réaliser un passage en douceur du milieu académique vers l’industrie ? Bérénice Kimpe a recommandé d’entrer en relation avec un maximum de professionnels ayant déjà accompli cette transition, en commençant par vos anciens camarades de formation, que vous rencontrerez en personne ou contacterez en ligne, par le biais de réseaux comme LinkedIn. "N'ayez pas peur de poser des questions personnelles. Demandez-leur ce qu'ils aiment le plus et ce qu’ils n'aiment pas dans leur travail, s'ils ont des regrets, par exemple". Et pour réussir la transition ? "Le processus peut être difficile, surtout au début", a pondéré Jakob Wolter. "Vous devez faire correspondre votre profil à celui de l'employeur, alors raisonnez en termes d’étapes : vous ne pouvez pas obtenir le job idéal dès le début, mais si vous anticipez le prochain échelon à l’avance, vous vous en rapprocherez au fur et à mesure."
Les conférenciers ont aussi eu des conseils pertinents concernant le ressenti négatif des superviseurs, Laurence Theunis allant jusqu'à proposer d'introduire des lignes directrices et de recommandations à leur endroit, afin de remédier à des situations ou des conversations parfois difficiles. "La communication est la clé", selon Tina Persson. "Vous devez comprendre la situation de votre superviseur ainsi que la vôtre. Leur mission est de prendre soin de leur carrière grâce aux publications, la vôtre est d'en prendre soin en commençant à préparer votre sortie dès le début plutôt que de la retarder à la dernière minute." Un point de vue défendu par Martin C. Michel, se fendant d'une célèbre citation de Louis Pasteur : "le hasard ne favorise que les esprits préparés", et par James Brosnan, qui a rappelé au public que les superviseurs de recherche sont avant tout humains - en tant que "parents universitaires", ils ont fait des projets pour vous ; certains sont ouverts sur le monde extérieur mais d’autres ignorent tout des réalités de la science en dehors du milieu universitaire, quand ce n'est pas en dehors de leur propre laboratoire !
Bien faire les choses
La question "Quelles sont les erreurs les plus courantes commises par les doctorants lorsqu’ils candidatent dans l'industrie ?" a déclenché des réponses passionnées, dont celle de James Brosnan : "des docteurs fraîchement émoulus, qui peuvent être experts mondiaux d’une chose aussi obscure que les brocolis, attendent parfois une forme de reconnaissance des gens de l'industrie. Cependant, il faut réaliser qu’il s’agit d’un tout nouveau départ. L’entreprise sera remplie de toutes sortes de profils, y compris des personnes senior réalisant le même travail depuis 30 ans, et qui auront vu défiler de nombreux docteurs – apprenez à mettre les gens de votre côté, à écouter attentivement au prime abord. Prenez conscience que votre doctorat est le début de votre carrière, et non une fin." Jakob Wolter a recommandé de trouver un mentor qui ne soit pas lié à votre chaîne de commandement pour vous aider à réfléchir sur vos options et décisions : "votre superviseur de recherche est l'interlocuteur adéquat sur beaucoup d’aspects, mais pas pour vous conseiller sur un plan de carrière 'alternatif', étant donné qu’il pourrait y voir un conflit d'intérêt."
Surqualifié/e ?
Le fait d'avoir un doctorat peut-il être vu "négativement" par des employeurs qui risquent d’estimer que vous êtes surqualifiés pour tel ou tel poste ? Et, par voie de conséquence, pousser certains chercheurs d’emploi à vouloir retirer ce diplôme de leur CV ? "Il est vrai que les employeurs sont forcés de trouver une connexion entre la personne et le travail", a reconnu Jakob, "et si le candidat semble surqualifié pour, disons, un emploi administratif, je ne les embaucherai pas si leur profil ne correspond pas à la fonction". Toutefois, si vous avez développé des compétences et des intérêts spécialisés au cours du doctorat, charge à vous de les faire ressortir plus que votre projet de thèse afin de démontrer votre pertinence pour le poste. Un conseil sur lequel tout le monde est tombé d’accord était : "ne retirez jamais votre doctorat de votre CV ni niez son existence !". Ce point a été complété par Bérénice, qui a souligné l’importance d’utiliser un CV différent pour chaque offre d’emploi, montrant que vous avez choisi une carrière dans l'industrie parce que c’est votre décision, pas un retour en arrière. Avant d'ajouter qu'une erreur répandue dans ce cas de figure était d'utiliser un CV académique pour postuler dans l'industrie.
Se présenter positivement
"Les doctorants arrivent sur le marché du travail armés d’un grand nombre de spécialités et de 'soft skills', comment se distinguer du lot quand on candidate à une offre d’emploi ?". Les conférenciers ont donné en réponse une liste exhaustive d’astuces et de conseils :
En résumé, les meilleurs conseils :
Si vous avez trouvé certains de ces conseils utiles, ne quittez pas tout de suite la page et livrez-vous plutôt à l'exercice suivant (10 minutes) : réfléchissez et écrivez dans un carnet trois actions concrètes que vous souhaiteriez mettre en œuvre, maintenant et pour l'année 2017, afin de faire progresser votre carrière dans la direction du job de vos rêves.