Le doctorat, une valeur à l?international

Evelyne JARDIN

Un demi poste d’Ater à l’université de Compiègne, c’est la seule proposition que Barrou Diallo parvient à décrocher après avoir postulé partout en France pour boucler sa thèse en informatique. Déçu, il décide de se « vendre » à l’étranger.

Comme beaucoup, pendant sa thèse, Barrou Diallo rêve d’un poste d’enseignant-chercheur à l’université. Déjà père de famille, il sait qu’il ne pourra pas se « retrouver sans salaire après son doctorat », alors il postule « un peu partout dans le monde ». Et ça mord ! Une entreprise d’informatique implantée dans le Connecticut lui propose un salaire annuel de 100 000 $ avec appartement et voiture de fonction. « J’ai pris conscience que ma valeur sur le marché du travail ne se limitait pas à un demi poste d’Ater ». C’est décidé : il fera carrière hors de France, sans pour autant céder aux sirènes des salaires mirobolants proposé dans les pays anglo-saxons où couverture sociale et frais d’éducation se paient cher.

Une carrière dans un organisme international
Les organismes européens, la Commission européenne et l’Office européen des brevets (OEB) le séduisent parce que les avantages sociaux y sont nombreux. En février 1999, Barrou entre comme examinateur de brevets à l’OEB sur le site de La Haye aux Pays-Bas. Il va gravir les échelons en un temps record. Il faut dire que sitôt arrivé, parallèlement à son activité d’examen des brevets, Barrou lance des projets : il participe à l’élaboration de séminaires internationaux pour expliquer aux entreprises le processus de recherche d’information parmi les brevets et collabore à des missions internes d’expertise en informatique. Ses initiatives sont récompensées. En 2003, on lui propose un poste d’expert à mi-temps au département de R&D et au bout de deux mois, il devient coordinateur des projets de R&D. Deux ans plus tard, il occupe temporairement la direction du département de R&D de l’OEB.

La R&D à l’OEB
Du côté « R », Barrou est en contact avec des chercheurs du monde entier. Il va de congrès en colloques pour leurs soumettre ses problèmes. Dernièrement, dans le cadre du 6ème programme cadre de la Commission européenne, il a noué un partenariat avec, entre autres partenaires, les universités de Stuttgart, Barcelona, Tessaloniki et Trento un programme commun de recherche dédié à la création d’un réseau de connaissances sémantiques à partir des données sur les brevets de l’OEB.
Du côté « D », Barrou gère les prototypes des logiciels, de l’implémentation aux tests utilisateurs. Son objectif entre le « R » et le « D » ? « Rechercher les outils les mieux adaptés pour faire face à l’accroissement des dépôts de brevets ces dernières années ». Là, son expertise en informatique est capitale puisqu’il s’agit d’améliorer des logiciels accédant aux bases de données internes (il n’y en a pas moins de 90). Mais au-delà des aspects techniques, la mise en place des prototypes requiert des connaissances juridiques, particulièrement en droit international pour rédiger les contrats. Le DESS de droit que Barrou a obtenu en 2001 à Lille 2 est un atout indéniable pour mener à bien sa mission actuelle.

Les avantages d’un organisme international
Comment pousser la porte de l’OEB ? Pour accéder au poste d’examinateur de brevets, outre un niveau Master, il faut maîtriser à l’écrit et à l’oral, les trois langues officielles de l’OEB : le français, l’anglais et l’allemand. Barrou a publié très tôt en anglais les résultats de sa thèse dans des revues internationales et à la fin de son doctorat, il est devenu consultant en Allemagne. L’anglais et l’allemand n’étaient donc pas des obstacles majeurs quand il a postulé à l’OEB.

Aujourd’hui, au quotidien, Barrou baigne dans un environnement multiculturel. « Dans le couloir de mon bureau, pas moins de neuf nationalités se côtoient ». Trente et un Etats sont membres de l’OEB.