Aujourd'hui Ingénieure de recherche au LNE (Laboratoire National de Métrologie et d'essais), Alexandra Delvallée a gravi les échelons depuis son stage de Master 2 recherche. Elle revient avec nous sur son parcours, et apporte un éclairage sur la recherche en métrologie et ses attentes.
Auteur : Alexandra DELVALLEE, PhD
Après une prépa scientifique (PCSI-PC), j’ai poursuivi en licence « Science de la matière » à l’Université d’Artois (Lens, Pas-de-Calais). Je suis ensuite partie en région parisienne pour suivre un parcours professionnel à l’université d’Evry Val d’Essonne, mention Matériaux, spécialité Nanomatériaux et Surface. Lors du master 2, j’ai eu l’opportunité de faire mon stage au LNE, qui m’a proposé par la suite d’effectuer une thèse CIFRE en collaboration avec l’ENSTA. Cette thèse portait sur la métrologie dimensionnelle de nanoparticules mesurées par microscopie à force atomique (AFM) et par microscopie électronique à balayage (MEB).
Mon activité se déroule dans un département qui a des objectifs mixtes : des objectifs de recherches et des objectifs d’activités commerciales. Mon métier est donc très varié avec des travaux de recherches typiques (manips, rédaction d’articles, projets scientifiques), mais également du développement d’activités commerciales comprenant la mise en oeuvre de prestations et du contrôle qualité. Nous proposons de la prestation à haute valeur ajoutée, les activités commerciales sont donc très liées aux activités de recherche.
Concernant les projets scientifiques, je coordonne avec des collègues plus expérimentés des projets internes qui concernent les activités internationales, le développement du microscope à force atomique (AFM) métrologique français ainsi qu’un projet multidisciplinaire sur la caractérisation du graphène. Je participe également à différents projets internationaux qui ont lieu dans le cadre de la métrologie européenne (programme EMPIR).
Parmi mes activités quotidiennes, ce que j’aime le plus est passer du temps au laboratoire. Aussi, ce qui me plait particulièrement, c'est de pouvoir continuer à apprendre tous les jours. La métrologie est toute indiquée pour cela puisqu'elle nécessite de tout remettre en cause en permanence, y compris soi-même ! Le LNE favorise lui aussi cela, puisque de nombreuses compétences et disciplines y sont développées. L’aspect commercial me plait moins, mais c’est aussi un domaine dans lequel j’apprends beaucoup.
La métrologie requiert d’être organisé et méthodique, voire pointilleux. Il est nécessaire de savoir trouver l’information par tous les moyens : articles, réseau, travail expérimental. Quant aux compétences liées à mon domaine, il est très difficile de répondre. Personnellement, j’ai plutôt des compétences en matériaux, instrumentation et métrologie, mais nous avons besoin de compétences très diverses au quotidien, notamment pour le développement instrumental. La métrologie ayant en horreur les instruments et logiciels « boites noires », nous aimons développer nos propres méthodes et instruments, ce qui nécessite de connaitre la mécanique, l’électronique, le développement logiciel, le traitement d’image, les mathématiques et la statistique…
J’ai eu la chance qu’à la suite de mon stage, on me propose une thèse, puis un contrat post-doctoral, puis un CDI au LNE. J’ai eu très vite le sentiment d’être intégrée à l’équipe. Il est vrai que l’on peut me reprocher d’avoir un parcours assez monotone, et de ne pas avoir assez « vu du pays » comparé à la très grande majorité des chercheurs. Cependant, j’ai effectué mon contrat post-doctoral dans une autre équipe du LNE, en nanométrologie électrique où j’ai beaucoup appris en électricité qui était très loin de mon domaine initial. De plus, comme le LNE regroupe des métiers et disciplines très variées, je trouve que les interactions occasionnées par mon travail sont loin d’être monotones !
Venant d’un master professionnel, je ne souhaitais pas initialement faire de thèse mais plutôt travailler directement à la sortie du M2. Cependant mon stage était très axé « recherche » et après de nombreuses discussions avec mes encadrants de l’époque (et mes collègues actuels), j’ai compris que je me plairais en recherche et j’ai accepté de poursuivre en doctorat. Après la thèse, le département d’électricité du LNE qui cherchait à développer une nouvelle activité de nanométrologie électrique m’a proposé un contrat post-doctoral, que j’ai accepté. Le CDI est venu ensuite dans cette équipe. Enfin, un poste s’est libéré dans mon équipe d’origine, que j’ai donc rejointe.
Lors de la transition vers la métrologie électrique, je n’étais pas sereine concernant mes compétences en électricité qui étaient assez basiques. J’ai eu la chance de travailler avec des collègues très compréhensifs, qui connaissaient mon parcours et qui profitaient de mes compétences en « nano » lorsque j’apprenais de leurs compétences en électricité.
À mon arrivée en tant que stagiaire, une des tâches qui m’était attribuée était la mise en place des bases d’un logiciel de traitement d’image. Mon parcours ne m’avait cependant pas permis d’apprendre le code du tout, et ils m’ont tout de même fait confiance sachant cela. Mes encadrants ont pris de leur temps et m’ont permis de développer mes compétences dans ce domaine qui m’était totalement inconnu, et tout cela en dépit de la forte contrainte de temps liée au stage. J’en ai retenu deux choses : qu’il est très peu probable de coller à 100% à une offre d’emploi de type « chercheur », et que je suis en capacité de combler les « manques ». Être confrotné directement à une problématique est très formateur.
En effet, le LNE est également un centre de formation et il est possible de profiter des formations en interne. Il existe très peu de licence/master qui proposent des cours complets de métrologie, seulement des « initiations ». D’emblée, il est donc souvent proposé aux doctorants d’effectuer une formation de base en métrologie. Un catalogue de formation interne très large est également disponible, incluant des formations spécifiques et transverses, nous pouvons faire la demande chaque année.
En interne, une animation scientifique peut se faire directement au sein de l’équipe selon le département d’accueil. Au niveau du LNE, des « Doctorales » ainsi que des « Séminaires Recherche et Développement » sont organisés tous les 6 mois.
Concernant le réseautage extérieur, j’ai eu la chance d’arriver au LNE au moment du lancement du « Club nanoMétrologie » qui est un réseau national d'acteurs académiques, industriels et institutionnels axé sur les problématiques de la nanométrologie, et piloté par le LNE et le Centre National de Compétences en Nanosciences du CNRS (C’Nano). Ce club organise des rencontres annuelles ainsi que des actions du type « journées techniques » et des inter-comparaisons auxquelles j’ai pu prendre part activement dès mon doctorat. J’y anime encore aujourd’hui un groupe de travail. Enfin, en tant que doctorante, post-doctorante puis ingénieur recherche, j’ai toujours été encouragée à aller présenter nos résultats dans des conférences nationales et internationales, qui sont propices au réseautage.
La métrologie est par essence un domaine pour lequel des collaborations internationales sont nécessaires, afin d’avoir un système d’unité international disséminé de façon homogène. Des comparaisons internationales sont donc très régulièrement organisées, donnant parfois lieu à des échanges de chercheurs
Aussi, pour les collaborations internationales, le LNE et plus globalement la métrologie française prend part à un programme européen appelé EMPIR. Un appel à projet a lieu tous les ans pour des projets de 3 ans autour de grands thèmes comme l’industrie, le « green deal »… Des échanges de chercheurs sont également possibles dans ce cadre.