Chez Volvo Aero

Evelyne Jardin

Après un doctorat en sciences de l’ingénieur soutenu à l’université de Limoges, Aurélien Tricoire obtient quelques opportunités d’embauche en région Centre, mais il préfère le Nord… de l’Europe.

1/ Que s’est-il passé entre la soutenance de thèse en octobre 2005 et votre entrée chez Volvo Aero, un an plus tard ?
Avant la soutenance, j’ai commencé à envoyer mon CV pour tester les réactions des entreprises et peaufiner mes candidatures. Mi septembre 2005, je passe un entretien chez Messier-Bugatti, mais leur décision se fait attendre et je me lasse de les relancer.
Après ma thèse, je suis une formation d’un mois dispensée par la Chambre de Commerce et d’Industrie de Limoges sur le démarchage par téléphone pour décrocher des entretiens d’embauche. J’accroche une PME (PSG Industrie) spécialisée dans le traitement de surface qui me propose un CDD de 18 mois. Deux jours après l’entretien, je reçois la réponse positive de Volvo Aero et en même temps, je suis contacté par un ancien collègue qui me propose un emploi en Allemagne. J’étais plutôt chanceux !

2/ Comment avez-vous obtenu votre emploi chez Volvo Aero ?
Je n’ai jamais candidaté chez Volvo Aero. J’ai rencontré le responsable du département recherche et développement (R&D) de projection thermique lors d’une conférence en mai 2005. Il s’était montré intéressé par mes compétences. Il m’avait dit qu’une embauche pour un CDD d’un an devait se débloquer. Il avait gardé ma carte et moi, je le relançais régulièrement.

La décision s’est fait attendre. Noël 2005 (soit six mois après notre rencontre), il me donne son feu vert. Le hic, c’est qu’entre temps, le CDD d’un an s’était transformé en CDD de trois mois. J’étais face à un dilemme : cela valait-il le coup de partir en Suède pour trois mois de travail ? N’était-il pas plus raisonnable de choisir le CDD que me proposait la PME ? J’ai réfléchi et je me suis dit « je suis jeune, qui ne tente rien n’a rien », alors je suis parti en Suède. A posteriori, je pense avoir fait le bon choix.

3/ Pourquoi avez-vous préféré Volvo qui vous demandait de vous expatrier ?
C’est une bonne question. Je n’étais pas complètement satisfait de l’entretien d’embauche chez la PME. C’est sûr, cet emploi n’était pas très loin de là où habitait ma fiancée… mais au fonds, je voulais quitter la France. J’ai découvert l’expatriation pendant mes deux stages en école d’ingénieur : l’un s’est passé en République tchèque et l’autre en Finlande. Je désirai repartir.

4/ Que s’est-il passé au bout des trois mois chez Volvo Aero ?
Ils m’ont proposé un nouveau CDD d’un mois, suivi d’un autre de trois mois… Au final, j’ai signé trois contrats de travail avant d’obtenir un CDI le 1er octobre 2006.

5/ Qu’est-ce qui a compté lors de votre recrutement ?
Mon sujet de thèse, sans aucun doute. Ca fait un an que je suis là et ils me considèrent comme l’expert dans ce domaine parce que j’ai fait une thèse sur le sujet.

6/ Le fait que vous ayez déjà séjourné dans un autre pays nordique, ça n’a pas compté ?
Non. Ils ont utilisé les périodes de CDD pour tester mes capacités d’adaptation.

7/ Considéraient-ils que vous deviez apprendre le suédois ?
Non. En Suède (et c’est aussi le cas en Finlande), tout le monde parle anglais. Je travaille en anglais. Avec mes CDD successifs, j’ai hésité à apprendre le suédois. Je m’y suis mis depuis six mois et je pense que fin 2007, je parlerai suédois.

8/ Quelles sont vos conditions de travail ?
Ici, à Volvo Aero, la hiérarchie est très peu pesante. Nous sommes installés dans des bureaux en « open space » et les portes du bureau du « chef » sont toujours ouvertes. Et puis, il y a très peu de différences salariales entre un ouvrier, un ingénieur et un docteur.

9/ Qui sont vos collègues ? Ce sont des scientifiques ?
Dans le département R&D de projection thermique, nous sommes douze dont quatre ingénieurs, trois étudiants, quatre techniciens et un manager qui n’est pas du tout un scientifique. Nous travaillons en R&D et en support du département production de projection thermique qui compte trente cinq personnes. Je suis le premier docteur en sciences du département et à la différence de la France, le statut de docteur est reconnu en Suède. Un docteur touche un salaire supérieur à celui d’un ingénieur.

10/ Quelles démarches administratives convient-il d’entreprendre pour pouvoir travailler en Suède ?
Depuis le 1er avril 2006, une loi stipule que tous les ressortissants de l’Union Européenne n’ont plus de démarche particulière si ce n’est celle de déclarer leur adresse et leur lieu de travail en Suède.

11/ C’est juste une déclaration à effectuer ?
Oui et ensuite, avec sa fiche de salaire, on peut demander un numéro de sécurité sociale. Avec ce numéro, on peut tout faire ici.

12/ Si un jeune docteur français désirant s’installer en Suède vous demandait des conseils, qu’est-ce que vous lui diriez ?
Premièrement, il faut être autonome et adaptable, c’est une nécessité. Deuxièmement, il faut parler anglais parce que c’est difficile de trouver quelqu’un qui parle français. Troisièmement, il faut s’attendre à se frotter à une culture et à un climat différents. En Suède, les jours sont beaucoup plus courts en hiver et plus longs en été. Du coup, le rythme de vie est décalé. Ma journée de travail prend fin à 17 heures et je suis le dernier à finir à cette heure-là ! En général, la journée de travail se termine à 16 heures avec un début de journée à 6 heures.

Propos recueillis le 15 février 2007, par Evelyne Jardin.