La jurisprudence à l'épreuve des évolutions technologiques // The jurisprudential phenomenon facing technical developments

L'activité des tribunaux français produit un contentieux quantitativement vaste. En 2023, pas moins de 1 911 185 décisions ont été rendues en matière civile et commerciale, auxquelles s'ajoutent les quelques 298 489 affaires réglées par les juridictions administratives (Les chiffres clés de la Justice. Édition 2024). Comprendre l'activité des tribunaux est crucial pour le fonctionnement du système judiciaire. Cela peut être abordé de deux manières principales : normative et réaliste.
Traditionnellement, les professionnels du droit appréhendent ce phénomène comme jurisprudence. Afin de déterminer comment les règles juridiques doivent être appliquées, les acteurs du système juridique produisent une description « jurisprudentielle » du contentieux. Certaines décisions perdent ainsi leur signification de cas particulier pour valoir interprétations authentiques d'un énoncé juridique. Seules quelques centaines de décisions sont ainsi publiées et commentées chaque année dans les revues juridiques. Plus rares encore sont celles qui intègrent les manuels ou ces ouvrages de références que sont « Les grands arrêts ». Ce processus de raréfaction du discours judiciaire implique une certaine herméneutique. Elle passe par l'inscription du contentieux au sein de supports dédiés : hier exclusivement papier, aujourd'hui aussi numériques.
Cette appréhension normative du contentieux comme jurisprudence n'est pas la seule façon de comprendre l'activité juridictionnelle. D'autres approches méthodologiques offrent une description non plus normative, mais réaliste du contentieux. C'est le cas de la description statistique du contentieux par la sociologie. L'analyse économique du droit et l'ethnométhodologie tentent de saisir le processus décisionnel pour en déchiffrer les facteurs et les manières.
Ainsi, la variété des formes de descriptions de l'activité judiciaire est généralement abordée à travers des questions théoriques liées aux épistémologies juridiques ou aux sciences sociales et économiques.
Le projet de thèse devrait ouvrir une perspective différente. L'hypothèse est que l'évolution des technologies impacte la description du contentieux et la théorisation qui peut en être faite. En particulier, les avancées technologiques dans le traitement des données influencent la façon dont se forme la connaissance du contentieux. Sans remonter à l'imprimerie, les ordinateurs des années 1980 ont déjà modifié l'appréhension du contentieux. Les nouvelles technologies ont permis une diffusion accrue et facilitée des décisions, qui étaient auparavant exclusivement accessibles par des formats papier. Enfin, le développement de l'IA et sa réception par les grands éditeurs juridiques permettent une approche renouvelée du contentieux, au point de potentiellement brouiller la distinction mentionnée précédemment entre descriptions normatives et réalistes de l'activité judiciaire.
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The activity of French courts results in a vast amount of litigation. In 2023, there were no less than 1,911,185 decisions in civil and commercial matters, in addition to the 298,489 cases resolved by administrative courts (Les chiffres clés de la Justice. Edition 2024). Understanding the activity of the courts is crucial to the functioning of the legal system. This can be approached in two main ways: normative and realistic.
Traditionally, legal professionals apprehend this phenomenon through case law. In order to determine how legal rules should be applied, actors within the legal system produce a jurisprudential description of the litigation. Some decisions lose their simple significance and become authentic interpretations of legal statements. Only a few hundred decisions are published and commented upon annually in legal journals. This process of rarefying judicial discourse involves a certain hermeneutic approach and the inclusion of content in formats that were once exclusively paper-based, but are now also electronic.
This normative apprehension of litigation as jurisprudence is not the only way to understand it. Other methodological approaches offer a realistic description of litigation. This is the case with the statistical description of litigation by sociology. Economic analysis of law and ethnomethodology attempt to capture the decision-making process to decipher its factors and methods.
The variety of forms of descriptions of judicial activity is generally approached through theoretical questions related to legal epistemologies or social and economic sciences.
The thesis project should open up a different perspective. The hypothesis is that the evolution of technologies impacts the description of litigation and the theorization that can be made of it. In particular, technological advances in data processing influence how litigation knowledge is formed. Without going back to the printing press, computers in the 1980s already modified the apprehension of litigation. New technologies have enabled the increased and facilitated dissemination of decisions, which were previously exclusively accessible through paper formats. Finally, the development of AI and its reception by major legal publishers allows for a renewed approach to litigation, to the point of potentially blurring the previously mentioned distinction between normative and realistic descriptions of judicial activity.
Such research cannot be conducted solely in the context of French law. Legal comparison is necessary to understand the links between legal knowledge and technological evolution. Thus, the thesis will compare French law and English law. This comparative perspective will particularly address the different relationships between civil law and common law systems regarding these developments in data processing.
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Début de la thèse : 01/10/2025

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41 DROIT

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