Thèse en océanographie côtière : modélisation couplée écologie et environnement physique (H/F)

Le doctorant sera principalement accueilli au sein du laboratoire DHYSED de l’unité DYNECO de l’Ifremer et interagira fortement avec le laboratoire LEBCO de la même unité.

L’objectif de l’unité DYNECO est d’étudier la réponse des écosystèmes côtiers aux pressions anthropiques et naturelles. Ses axes de recherche portent sur : i) les flux de matières dans le continuum homme-terre-mers côtières, ii) les dynamiques spatiales et temporelles des interactions Homme-Habitats-Biodiversité et iii) les méthodes pour l’analyse des écosystèmes en croisant observation, expérimentation et modélisation.

Au sein de l’unité DYNECO :

• Le laboratoire DHYSED étudie les processus hydro-sédimentaires en interaction avec le biotope et les activités anthropiques à différentes échelles spatiales (i.e. des façades métropolitaines aux estuaires) et temporelles (de la marée au pluri décennal).
• Le laboratoire LEBCO s’intéresse à la diversité et au fonctionnement des écosystèmes marins côtiers et plus particulièrement aux réponses des espèces et des communautés face aux pressions naturelles et anthropiques

Au cours de ce travail, le doctorant sera également accueilli au Data Sciences Centre de Queensland University of Technology à Brisbane (Australie). Ce centre s’intéresse à la compréhension des systèmes environnementaux naturels via le développement d’outils numériques et de méthodes statistiques pour l’écologie et la gestion des espaces naturels.

Résumé de la thèse

Le candidat aura le choix entre 3 sujets suivant son expérience et ses souhaits

Projet 1 : Comprendre et prédire les causes et les conséquences de la fragmentation des herbiers marins dans le lagon de La Réunion

Les herbiers marins forment des habitats côtiers à haute valeur écologique car ils sont des ingénieurs d’écosystèmes, abritant une grande biodiversité, améliorant la qualité de l'eau, protégeant les côtes de l'érosion, des tempêtes et des inondations et piégeant le carbone. Ils sont en déclin depuis près d’un siècle avec une perte mondiale annuelle estimée à 7 % (Programme des Nations Unies pour l’environnement 2020). Dans les régions tropicales, les pressions anthropiques sont très fortes, le déclin des herbiers marins est important et la biodiversité est fortement menacée.

À la Réunion, les herbiers sont répartis de manière éparse dans tout le lagon. La couverture d’herbiers marins s’est maintenue entre 1951 et 2016 : malgré des phases de déclin et de régénération, l’herbier s’est montré très résilient. Mais en 2017, les herbiers ont commencé à décliner et ont quasiment disparu aujourd’hui, laissant penser qu’au-delà d’un certain seuil de fragmentation, l’herbier ne peut plus se régénérer.

Le projet vise à analyser la dynamique de fragmentation des herbiers marins au fil des décennies dans un environnement tropical et à explorer les causes de leur fragmentation à l'aide d'un modèle spatio-temporel de dynamique des herbiers, existant, couplant un modèle hydro-sédimentaire basé sur la résolution des processus avec un modèle de croissance d’herbier probabiliste. Des seuils de fragmentation au-delà desquels l’herbier n’est plus résilient pourront être identifiés dans ce système tropical fortement anthropique et en proie au changement climatique. Une approche méthodologique sera menée pour mieux comprendre les processus de fragmentation et leur incertitude et faire des prédictions pour fournir une aide à la décision éclairée sur les risques.

Projet 2 : Comprendre et prédire les causes naturelles et anthropiques du déclin des herbiers marins dans le lagon de La Réunion

Les systèmes lagunaires, relativement protégés des forts courants et vagues, constituent des zones propices au développement des herbiers marins, mais les pressions anthropiques croissantes et le changement climatique provoquent leur déclin. C’est le cas à la Réunion où les herbiers marins disparaissent depuis 2017, bien en deçà de la couverture documentée entre 1951 et 2016.

L'objectif du projet est d'identifier et d'évaluer les processus impactant le déclin des herbiers à La Réunion. L'étude sera basée sur des données satellitaires et hyperspectrales et sur une analyse photographique de la couverture d'herbiers depuis 1951, combinée à l'identification et à la quantification des processus environnementaux et anthropiques qui pourraient être liés au déclin des herbiers. Ce jeu de données permettra de tester différentes hypothèses expliquant la dynamique des herbiers de La Réunion par une approche de modélisation. Le projet consistera à améliorer et à modifier un modèle existant de la dynamique spatio-temporelle des herbiers, issu du couplage entre un modèle probabiliste de croissance des herbiers et d’un modèle hydro-sédimentaire basé sur la résolution des processus.

Les travaux porteront sur le modèle probabiliste de croissance des herbiers incluant les processus locaux agissant sur la dynamique des herbiers tels que la destruction mécanique par les houles australes et cycloniques, le broutage par les tortues, les contaminants chimiques, la protection apportée par le récif corallien, les résurgences d'eau douce, etc. Pour cette modélisation probabiliste, une attention particulière sera portée à l'évaluation des seuils sur les différentes pressions agissant sur la dynamique des herbiers. Le résultat de l’étude sera un modèle conceptuel décrivant la dynamique des herbiers marins à La Réunion, mettant en évidence les processus initiant et entretenant le déclin en cours. 

Projet 3 : Comprendre et prédire la dynamique des herbiers marins dans le lagon de La Réunion pour guider leur restauration.

Les herbiers marins sont classés comme espèces sentinelles car ils indiquent clairement les changements environnementaux marins à l’échelle locale, régionale et mondiale. Ils sont considérés comme un indicateur de la qualité de l’eau dans la Directive Cadre sur l’Eau et constituent une espèce bio-ingénieur suivie dans la Directive Cadre Stratégie pour le Milieu Marin. La dynamique des herbiers est complexe et est régie par une multitude de forçages sur différentes échelles de temps. Par conséquent, une approche écosystémique intégrée est nécessaire pour comprendre et modéliser les processus de déclin des herbiers. Dans le cadre d’une collaboration entre l’Ifremer et l’Université du Queensland en Australie, un modèle spatio-temporel de dynamique des herbiers couplant un modèle hydro-sédimentaire basé sur la résolution des processus et un modèle probabiliste de croissance des herbiers a été développé pour simuler l'évolution des herbiers à l'échelle régionale sur des périodes supérieures à 10 ans. Un tel outil est nécessaire pour aider les autorités locales à mettre en place les meilleures pratiques de gestion pour protéger les herbiers.

À la Réunion, la couverture spatiale des herbiers régresse à un rythme alarmant depuis 2017, sans causes clairement identifiées. Le projet vise à modéliser l'effet de scénarios de gestion pour prévenir le déclin des herbiers de La Réunion et réhabiliter les herbiers du lagon en partenariat avec les autorités locales. Il vise également à améliorer les indicateurs existants de suivi des habitats à herbiers et à faire des propositions pour adapter les programmes de suivi actuels dans le cadre des différentes directives européennes. Cela implique d'identifier et de dépasser les limites de notre modèle : prise en compte des pressions anthropiques (différentes des changements de température et des modifications des conditions de lumières), intégrer une dimension socio-économique, définir des scénarios de gestion, etc. Le modèle développé, permettra de discriminer la variabilité naturelle de la variabilité induite par l'homme dans la dynamique des herbiers. Ce projet scientifique sera en partenariat avec les autorités locales de la réserve naturelle dont la mission est de surveiller l'état des écosystèmes côtiers et qui coordonne les différents programmes de surveillance associés.